Cass. Lux. 26 novembre 2020

Les deux arrêts n°160/2020 (CAS-2019-0147) et n°159/2020 (CAS-2019)00148) et  concernent en réalité la même affaire, mais sous un angle processuel différent. Le premier, rendu en matière commerciale concerne le fond du dossier, tandis que le second est relatif à la procédure de rétractation sur base de l’article 66 NCPC d’une ordonnance unilatérale du Président du Tribunal d’arrondissement visant à paralyser la résiliation du contrat-cadre litigieux.

Le volume de ces arrêts ainsi que celui des conclusions du Parquet général ne doit pas dissimuler le fait que les parties se disputaient sur la question de savoir si le contrat cadre signée entre elles en 2009 et mentionnant expressément un terme au 31 décembre 2012 devait recevoir application au-delà de cette date. La question était d’importance puisque ce contrat, rédigé comme il se doit par l’un des plus gros cabinets de la place, réglait la répartition et la destination des actifs apportés à un fonds d’investissement ayant pour objet de faire fructifier le patrimoine de deux familles d’investisseurs, notamment par de l’investissement dans des opérations de promotion immobilière.

Les deux investisseurs étaient associés chacun pour moitié, de sorte que la mésentente a conduit au blocage de l’ensemble du groupe, y compris le fonds. L’une des parties a donc saisi les juridictions afin de voir exécuter le contrat litigieux. Le Tribunal, saisi par assignation du 30 avril 2015, a notamment décidé dans son  jugement du 22 février 2016, que le contrat était toujours en vigueur et a désigné un administrateur provisoire pour le fonds ainsi que l’exécution provisoire sans caution.

Le litige a alors donné lieu à (au moins) quatre procédures:

  • l’une au fond (CAL, 4e ch. com., n°112/19 du 10 juillet 2019, n°43534 du rôle),
  • l’autre devant le juge des référés afin de suspendre l’exécution du jugement (ord. des 30 mai, 1er juillet et 3 août 2016, confirmé par la Cour d’appel le 19 octobre 2016 (arrêt n°134/16, n°44000 du rôle), approuvé par la Cour de cassation, arrêt n°08/2018 du 25 janvier 2018, n°3906 du registre),
  • la troisième procédure étant engagée devant la Cour d’appel afin d’obtenir la réformation du jugement en ce qu’il avait accordé l’exécution provisoire sans caution (CAL, 4e ch. com. n°156/16, 9 novembre 2016, n°43534 du rôle).
  • Pour finir, la 4e procédure consistait en un référé rétractation à l’encontre de l’ordonnance sur requête rendue à la demande de l’administrateur provisoire et visant à obtenir la suspension de la « résiliation » du contrat cadre.

A l’occasion de la procédure au fond, la Cour d’appel a infirmé le jugement en ce qu’il avait retenu que le contrat était toujours en vigueur et admis que celui-ci avait pris fin au terme indiqué, le 31 décembre 2012. La Cour de cassation rejette le pourvoi, essentiellement en raison de ce qu’il critique des éléments relevant de l’appréciation souveraine des juges du fond ou leur reproche de n’avoir pas relevé d’office l’application de la responsabilité contractuelle, alors que la demande ne semble pas avoir été faite à hauteur d’appel.

S’agissant du référé suspension, l’ordonnance avait été rétractée par application de l’article 66 NCPC, solution approuvée par la Cour d’appel, 7e ch., arrêt numéro 117/19, du 10 juillet 2019, numéros CAL-2019-00140 et CAL-2019-00170 du rôle. Les juges du fond ont estimé que la demanderesse ne justifiait pas que les conditions requises pour statuer unilatéralement nonobstant le principe du contradictoire étaient réunies, appréciation qui relève de leur pouvoir souverain, de sorte que le pourvoi est à rejeter. Le Parquet général souligne dans ses conclusions que de jurisprudence(1)Arrêt cité en page 11, note 7, des conclusions du Parquet général: Cour de cassation, 25 janvier 2018, n° 08/2018, numéro 3906 du registre, arrêt également rendu dans ce même dossier.:

« l’adoption d’une ordonnance sur requête en dehors des cas expressément prévus par la loi suppose la recherche et le constat du critère légal de la nécessité qui commande que la mesure soit ordonnée à l’insu de l’adversaire du requérant. »

Le 3e arrêt, civil, n°158/20 et n°CAS-2019-00149 du registre, concerne une action en dommages-intérêts engagée par l’acheteur en raison de vices cachés dont auraient été affectés l’immeuble. La Cour de cassation rejette le pourvoi en indiquant qu’il relève de l’appréciation souveraine des juges du fond notamment de décider que l’acheteur ne prouve pas l’antériorité à la vente des vices dont il se plaint.

Il était encore reproché à la Cour d’appel (2)CAL, 2e civ. arrêt n°35/19 du 27 février 2019, n°44513 du rôle. d’avoir écarté des conclusions tardives, car notifiées le jour même de l’audience de clôture, alors que la partie concluante avait déjà conclu de façon exhaustive par deux fois et reçu les conclusions adverses un mois auparavant:

« Sous le couvert du grief tiré de la violation de la disposition visée au moyen [article 64 NCPC], celui-ci ne tend qu’à remettre en discussion l’appréciation, par les juges du fond, du respect du temps utile endéans lequel les parties doivent se faire connaître mutuellement les moyens de fait et de droit et les éléments de preuve produits à l’appui de leurs prétentions, nécessaire à chacune d’elles pour organiser sa défense, appréciation qui relève de leur pouvoir souverain et échappe au contrôle de la Cour de cassation. »

References

References
1 Arrêt cité en page 11, note 7, des conclusions du Parquet général: Cour de cassation, 25 janvier 2018, n° 08/2018, numéro 3906 du registre, arrêt également rendu dans ce même dossier.
2 CAL, 2e civ. arrêt n°35/19 du 27 février 2019, n°44513 du rôle.

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